Pour des patients présentant un SAHOS, à partir d’un centre référent

Enquête qualitative autour de la prise en charge de patients présentant un SAS et des comorbidités en distanciel avec un accompagnement éducatif à partir d’un centre référent.

1) Contexte

En France, le syndrome d’apnées/hypopnées obstructives du sommeil (SAHOS) touche environ 5 % de la population, soit autour de 3 millions de personnes. La prévalence du SAHOS dans les autres pathologies chroniques est de :
• 77 % chez les patients présentant une obésité morbide [1],
• 50 % chez les patients insuffisants cardiaques [2],
• 35 % chez les patients présentant un diabète de type 2 [3],
• 80 % chez les patients atteints d’hyper­tensions réfractaires [4].
Des enquêtes d’impact montrent que les patients éduqués ayant une ou des maladies chroniques, qui acquièrent des connaissances sur leur(s) maladie(s) et reçoivent davantage de recommandations sur la conduite à tenir se disent plus confiants et moins seuls. En effet, l’efficacité de l’éducation thérapeutique (ETP) structurée a été maintes fois prouvée dans un grand nombre de pathologies chroniques, en termes d’amélioration de la gestion de la maladie et, souvent, des aspects psychosociaux. Nous citerons notamment l’étude de Lagger et al. [5], qui regroupe les résultats de 34 méta-analyses, soit un total de 557 études représentant environ 54 000 patients dans huit pathologies chroniques. L’ETP y paraît bénéfique dans 58 % des cas, sans effet démontré dans 35 % des cas, et aux conséquences négatives dans 7 % des cas.
La répartition des programmes ETP sur le territoire français n’est pas homogène avec une forte prévalence des programmes hospitaliers. Les programmes ETP autour des maladies du sommeil sont encore confidentiels, néanmoins des structures ambulatoires telles que le Centre éducation thérapeutique Bordeaux Nouvelle-Aquitaine (CETB NA) et le Pôle ETP ambulatoire Nouvelle-Aquitaine se sont développées depuis plusieurs années, afin de proposer une offre ETP de qualité autour de plusieurs maladies chroniques au sein d’un programme « polypathologies ».
Environ 12 000 patients adressés par leurs médecins généralistes ou spécialistes ont bénéficié de programmes ETP ou d’accompagnement éducatif en médecine de ville, sur le département de la Gironde.
En 2023, le CETB NA initie avec deux médecins spécialistes et la société SOS Oxygène, prestataire de santé à domicile (PSAD), un projet expérimental d’accompagnement éducatif en distanciel pour 20 patients d’Aix-en-Provence, présentant un syndrome d’apnées du sommeil et des comorbidités. Ce territoire ne proposant pas d’offre dans le cadre de cette pathologie et en médecine de ville.

2) Déroulé de la prise en charge

En figure 1 et figure 2 sont respectivement représentés le parcours de soins et les ateliers proposés aux patients qui entreprennent une éducation thérapeutique.


Figure 1 – Parcours de soins.

Figure 2 – Liste des ateliers d’accompagnement éducatif proposés aux patients à l’issue du diagnostic éducatif (DE).

3) Méthode de l’enquête

Un questionnaire post-programme a été envoyé aux 20 patients pris en charge dans le cadre de cette expérimentation et qui ont participé au programme d’accompagnement éducatif numérique en visioconférence, avec des ateliers individuels et ateliers de groupe. Chaque patient interrogé ayant participé à au moins un atelier sur l’apnée du sommeil ou son traitement.
L’enquête porte sur les retours des questionnaires patients et des éducateurs (professionnels de santé formés à l’ETP) ayant animé les ateliers. Toutes ces analyses ont été réalisées de manière anonyme, dans le cadre de l’enquête.

4) Résultats de l’enquête

1) Nombre moyen d’ateliers par patients

Les 20 patients ayant accepté d’entrer dans cette expérimentation ont réalisé en moyenne 3,23 ateliers éducatifs chacun, soit au moins un DE et deux ateliers collectifs chacun.
Les thématiques d’ateliers réalisés prioritairement sont l’atelier sur la maladie qu’est le SAS « Mieux vivre avec un SAS » et la PPC « Le traitement des apnées du sommeil ».
On note également un réel intérêt pour les ateliers autour de l’alimentation et de façon plus générale les compétences psychosociales (mieux gérer son stress, trouver des solutions pour agir…).

2) Les bénéfices exprimés par les patients

« Permet de participer même quand on ne peut pas venir en présentiel. »
« Pratique, accompagnement depuis chez soi et créneaux horaires facilitants pour les actifs. »
« Sympa et humain malgré la barrière de l’écran. »
La figure 3 reprend les mots les plus utilisés par les patients pour décrire leur expérience.


Figure 3 – Les mots des patients pour qualifier l’accompagnement éducatif à distance dont ils ont bénéficié.

3) Les bénéfices exprimés par les éducateurs

  • La participation de patients de régions différentes (Nouvelle-Aquitaine, PACA) au sein des ateliers permet une grande richesse autour de partages d’expériences.
    « Elle encourage les autres patients à poursuivre le traitement. »
    « Ils viennent à l’atelier pour échanger, avoir des retours d’expérience. »
    « Ils parlent parfois de la PPC comme d’une contrainte et cherchent, à travers les échanges de vécu ou d’expériences (réveils en état de panique) avec les autres patients, à retrouver une motivation dans la durée. »
    « Les témoignages positifs sont très encourageants pour les autres participants. »
    « Le patient a pris conscience des enjeux et de l’intérêt du traitement. »
    « Elle fait part de son ressenti et de son expérience. »
  • Le suivi de ce programme soutient la motivation à se traiter, la persévérance dans l’utilisation de la machine et une meilleure observance.
    « A trouvé la motivation à se traiter, car il n’était pas assidu. »
  • À propos des apports de connaissances sur la maladie.
    « Elle ressort de l’atelier en comprenant mieux le mécanisme et sa relation à l’hérédité. »« Se doutait du risque cardiovasculaire du SAS, cet atelier lui a permis de mieux comprendre. »
    « Mieux comprendre les répercussions de l’apnée sur les cycles de sommeil. »
    « Connaître des facteurs de risque qu’il ignorait. »
    « A donné un “coup d’accélérateur” à la prise de conscience. »
  • Des clés pour communiquer sur la pathologie à l’entourage.
  • Elle permet et accompagne la mise en place d’une meilleure hygiène de vie.
    « Cela l’a confortée dans les changements qu’elle a mis en place, arrêt du tabac, régime pour perdre du poids, sevrage du sucre. »
    « Cherche à savoir ce qu’il peut améliorer dans son quotidien. »
  • L’acceptation du diagnostic.
    « Elle s’est sentie soutenue, confiante et rassurée. »
    « Sentiment de ne pas être seul. »

5) Discussion et recommandations

Quelle pertinence pour l’accompagnement éducatif proposé ?

Les résultats ont été classés par domaine et sont :

  • Les connaissances autour de la pathologie : les patients prennent conscience des facteurs de risque associés au syndrome d’apnées du sommeil et mesurent ainsi l’importance d’une bonne observance ;
  • l’effet motivationnel : l’échange entre les participants et le partage d’expérience vécue sont un réel moteur pour le groupe. Ils permettent de trouver des leviers motivationnels les incitant à persévérer dans leur traitement « les effets bénéfiques sont le principal moteur à ma motivation » ;
  • la montée en compétences : liée à une meilleure compréhension du fonctionnement et de l’utilisation de la PPC « les ateliers m’ont aidé à mieux utiliser l’appareil. »

Quelle faisabilité pour ce type d’expérimentation ?

  • Cette offre, non disponible de manière équitable dans chaque région, a permis de montrer sa pertinence grâce à la visioconférence.
  • Cette initiative a été très appréciée des patients ayant pu en bénéficier : « Cette prévention devrait être développée par d’autres structures. J’ai eu la chance d’être aiguillé sur ces ateliers par mon pneumologue, mais combien n’y ont pas droit… », « Continuez vos ateliers et même d’autres ateliers sur d’autres thématiques. », « C’est super ! Continuez comme ça ! »
    L’expérimentation d’un programme d’accompagnement éducatif en distanciel sur un territoire ne présentant pas d’offre et les résultats qualitatifs sur ce groupe de 20 patients montrent l’intérêt et les bénéfices de ce type de prise en charge. Une réflexion pour une proposition élargie reste à mener, entre les différents acteurs, autour des patients présentant un syndrome d’apnées du sommeil et des comorbidités.

Références :
1. O’keeffe T, Patterson EJ. Evidence supporting routine polysomnography before bariatric surgery. Obes Surg 2004 ; 14 : 23-6.
2. Javaheri S, Parker TJ, Liming JD et al. Sleep Apnea in 81 Ambulatory Male Patients With Stable Heart Failure. Circulation 1998 ; 97 : 2154-59.
3. Einhorn D, Stewart DA, Erman MK et al. Prevalence of sleep apnea in a population of adults with type 2 diabetes mellitus. Endocr Pract 2007 ; 13 : 355-62.
4. Logan AG et al. High prevalence of unrecognized sleep apnoea in drug-resistant hypertension. J Hypertens. 2001 ; 19 : 2271-7.
5. Lagger G, Pataky Z, Golay A. Éfficacité de l’éducation thérapeutique. Rev Med Suisse 2009 ; 5 : 688-90.